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31 octobre 2011 1 31 /10 /octobre /2011 14:53

HPIM2366

 

Je suis assise dans le jardin de Claude Monet à Giverny. Les capucines envahissent les allées. On imagine le père de l’impressionnisme, longue barbe grisonnante, comme sur les photographies de Nadar, donnant d’une voix assurée des ordres aux jardiniers. Giverny, rêve d’artiste, utopie réalisée, interprétation impressionniste d’une estampe japonaise, ces ukiyo-e, images du monde flottant. Ici la végétation est si luxuriante qu’on voudrait parler de bosquet de géranium et la notion de massif de fleurs prend tout son sens. Jardin des paroxysmes où les nymphéas semblent plus épanouis que partout ailleurs et où les fleurs ne semblent jamais s’éteindre…Spectacle étonnant d’une nature perpétuellement renouvelée. C’est le pinceau qui a composé ce jardin-atelier où les essences s’harmonisent en fonction des couleurs complémentaires. Vert des feuillages. Tache rouge des pétales. Palette botanique. Monet lui-même ne vivait- il pas comme une fleur dans son jardin ? Matinal, sensible aux premières rosées et effets de brumes, vivant au rythme du soleil, contemplatif, je dirai même bouddhiste dans sa manière d’appréhender l’instant, cet instant qui jamais ne se reproduira et qu’il convient de saisir, vite, sur la toile car « anicha », tout passe.

On aurait tort de résumer l’impressionnisme à un art de surface, s’arrêtant aux ondes, aux ombres, aux raies de lumières. Monet connaît les travaux d’optique d’Eugène Chevreul, il les a parfaitement assimilés, au point de contempler semble t-il les choses de l’intérieur – vision intrinsèque qui rend son ami Georges Clemenceau admiratif : « l’acier de votre rayon visuel brise l’écorce des apparences et vous pénétrez la substance profonde pour la décomposer en des véhicules de lumière que vous recomposez au pinceau, afin de rétablir subtilement, au plus près de sa vigueur, sur nos surfaces rétiniennes, l’effet des sensations. »

On ne peut s’empêcher d’imaginer Monet dans son jardin, au bord du bassin, dressant le bilan de ces années consacrées à la peinture, son sacerdoce. Qu’est ce qui est important ? qu’est ce qui ne l’est pas ?  A cette question que tout un chacun se pose au soir de la vie, Monet nous a donné sa réponse-testament : les nymphéas, rêverie picturale et poétique d’une ondine fin de siècle. C’est rien. L’eau, le vide, le flottement, le silence, la simplicité délicate de ces fleurs d’eau. Mais ce rien est tout, il est immense, il déborde du cadre qui nous remplit. Tout est important : les pétales, les ombres, l’eau bleutée ou franchement verte en fonction des lumières. Monet, esprit équanime contemple chaque chose dans sa beauté propre.

 

 

 

Quand je pense à Monet je pense à Van Gogh. Un autre esprit libre, indifférent à la critique. Deux hommes, deux styles, deux destinées. Mais deux amoureux du paysage, c’est certain. Éperdument épris de couleur.

Je suis debout dans la chambre de Van Gogh, celle qu’il louait à Auvers –sur –Oise, à l’auberge Ravoux. La seule lucarne de cette chambre exiguë donne sur un mur aveugle. Fenêtre ouverte sur un jardin intérieur ? cellule monacale s’il en est, mais Van Gogh ne s’était-il pas représenté le crâne rasé, comme un moine ? Du silence, du vide. Du gris. L’espace semble monochrome, atone, aphone. Mais c’est une surface qui ouvre la brèche à tous les possibles. Une chambre comme un tableau d’ardoise. Reste le morceau de craie.

Chez Van Gogh c’est le paysage tout entier qui est un jardin. Les couleurs sont plus acides, comme chez tous les esprits tourmentés. Les ciels violets. Les champs jaune vif. Scène avant l’orage, avant la tempête. Monet peint l’instant, Van Gogh le prévoit. Il peint l’avant. Avant le coup de vent. Avant le coup de sang. Avant qu’il ne soit trop tard.

Les toiles sèchent dans la petite chambre. Juste avant, Vincent a planté son chevalet au milieu de son jardin : champs de blé. Champs labourés. Toujours des champs dans son champ visuel. Van Gogh est un laboureur, les pieds sur la terre mais la tête dans les nuages. Ou plutôt vers les nuages : des ciels immenses comme chez les maîtres hollandais du XVIIIe siècle, de japonisants amandiers en fleurs, vus d’en bas, en contre-plongée, comme lorsque nouveau-nés nous contemplions le monde à l’envers, du fond de notre berceau.

Les nymphéas de Monet, vision d’une petite cantharide au-dessus de l’eau.

Les amandiers en fleur de Van Gogh, un regard d’enfant, émerveillé de la beauté du monde.

 

Lucie Héron http://www.guidemidi.fr link

Georges Clemenceau in Claude Monet, les Nymphéas

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26 octobre 2011 3 26 /10 /octobre /2011 10:05

Venise et ses églises

 

 

Veni Etiam - Reviens encore

A Venise tout commence et tout finit dans les églises. On raconte que la ville fut fondée en 421, un 25 mars, jour de l’Annonciation de la naissance du Christ.

Venise, ville flottante, ville horizontale, aspire à l’élévation ? Ses campaniles et milles clochers sont comme des phares qui prennent parfois la silhouette de minarets, manière de rappeler que l’Orient est toujours bien présent.

 

En matière de religion, Venise, s’arrange, Venise bricole. Dans les églises, les vierges ont des sensualités de Vénus, des regards de courtisanes, des rougeurs de jeunes filles, des blondeurs de vénitienne… mais oui, levez les yeux, et vous les verrez peut-être, les cheveux épars, en corolle autour du crâne, ces vénitiennes qui, juchées sur quelqu’Altana, s’efforcent de blondir leur chevelure au soleil.

Mais silence. Une vieille dame entre à San Trovaso. Quelques raies de lumière se glissent dans son sillage. Elle écarte l’épais velours cramoisi, théâtral, qui sert de porte en cette chaude après-midi de juillet. Ses bras sont chargés de glaïeuls roses, d’un rose qui semble fait pour les confiseries en pâte d’amande, des glaïeuls un peu raides qu’elle arrange amoureusement avec l’ancien bouquet – glaïeuls blancs – déjà là. Odeur de fleurs fraîches. Du vent. Du vent qui soulève le rideau. Le soleil sur les dalles. Le rideau rouge. Titien n’est pas très loin.

A Venise, d’autres églises sont comme des courtisanes trop maquillées, mais on leur pardonne. Ici, tout est théâtre.

Je cherche… je cherche l’église Saint Pantalon, vous connaissez ? des touristes incrédules me dévisagent. Blasphème ?  Je pointe l’index dans mon guide. Elle s’appelle vraiment Saint Pantalon. Nous sommes à deux pas de Dorsoduro, littéralement, le « dos dur », il faut certainement avoir bon dos pour supporter ces petits arrangements avec l’hagiographie. Dans mon guide je lis : « par un miracle de trompe l’œil, le plafond semble s’enfoncer dans le ciel, c’est une illusion d’optique due à Giovanni Antonio Fumiani, qui a présenté ici le martyr et l’apothéose de Saint Pantalon » (Pantaléon en italien). Vertige et verticalité.

 

Autre sestieri, autre ambiance, nous sommes maintenant à Cannaregio, l’un des plus vastes des six quartiers vénitiens. L’église Santa Lucia n’est plus, elle a été démolie pour construire la gare qui porte son nom, mais ses reliques sont à San Geremia e Lucia. Sainte Lucie, martyr de Syracuse, sainte patronne des mal voyants. Dans un sarcophage de verre, son petit corps vêtu d’une robe rouge, comme les princesses des contes de fées. Un masque sur le visage. Les pieds fins, presque des pieds d’enfant, dépassent de la robe, et c’est comme une fine craquelure de peau sur un soupçon de corps. Processions, génuflexions, signes de croix devant cette esquisse.

C’est samedi. Pour me rendre à l’église des Jésuites à l’autre bout de Cannaregio je traverse le ghetto, jadis séparé du reste de la ville par des grilles qu’on fermait la nuit. Les maisons y sont plus hautes qu’ailleurs, le linge qui sèche claque au vent. Odeur de gâteau devant la pâtisserie Kascher. Élégance des passants. Aux Gesuati, baroque triomphant, incrustation de marbre, drapés de stucs… Bonbonnière.

J’attrape un vaporetto au Fondamenta Nuove, on aperçoit les mystérieuses portes d’Hadès du cimetière San Michele, qui inspirèrent dit-on le peintre Arnold Böcklin. Pas de mélancolie pourtant, le vaporettiste annonce bruyamment les stations, on est loin, très loin de la Venise déliquescente et valétudinaire de Thomas Mann. Flottement. Une ville sur l’eau. Veni etiam. Venise.

 

 

 Lucie Héron, guide-conférencière

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25 octobre 2011 2 25 /10 /octobre /2011 18:10

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Pourquoi Robedebure? ceci n'est pas le blog d'une communauté religieuse, encore moins une secte ou un blog new age. Je ne vous inciterai pas à manger macrobiotique, à respirer par le ventre ou à me donner vos coordonées bancaire en ligne en vous menaçant que si vous ne le faites pas, un mamouth putride va étouffer votre belle mère ou s'asseoir sur votre pavillon Bouygue.

Mon idée de départ c'est un peu comme cette petite pousse verte en photo: même dans les terrains ou périodes hostiles, on se fraie un chemin et on prend plaisir dans les petits rien de la vie. Je vous parlerai donc de mes bons plans, mes coups de coeurs, mes recettes, voyages, sorties et  réflexions et j'attends VOS commentaires!

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25 octobre 2011 2 25 /10 /octobre /2011 17:53

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